Anonymiser le politique

En fouillant mes archives, je suis tombé sur vieux texte que j’avais écrit en 2002 après le choc du 21 avril. J’ai trouvé amusant d’en ressortir un extrait à quelques semaines du Congrès du PS.
J’y faisais un rêve : et si les motions (et les textes de lois !) étaient anonymes ? Il se passerait quoi ?

D’abord, le constat. Tous les partis sont traversés de courants, d’écuries, de clubs. Bref d’enjeux de personnes. De fait, on ne se positionne plus que par rapport à une signature. Qui a écrit cet amendement ? Qui a rédigé cette motion ? Qui est a l’origine de cette proposition ? Nous sommes tous alors réduits, non pas à lire le texte, mais à chercher à savoir ce que le vote de telle ou telle proposition impliquera dans les équilibres de courants (et les répartitions de postes). Cette atmosphère est à l’origine du discrédit politique. Pas la peine d’en faire des tonnes. Ce qui exaspère l’électorat et les citoyens comme moi c’est justement cette personnalisation à outrance des enjeux politiques.

J’arrête le blabla et j’en viens à ma proposition qui se veut un idéal. Pourquoi ne pas rendre les propositions, textes motions et amendements, anonymes ? Qu’on ne sache pas qui les a signé ! On serait soudainement contraint de lire les textes ! De se positionner sur le fond tout simplement parce qu’on aurait pas d’autre choix.

C’est beau de rêver.

Pétain utilisait aussi le délit d'offense à chef d'état

Le Monde daté de demain :

Romain Dunand a comparu en appel, mercredi 22 octobre, à Paris, pour « outrage », pour avoir adressé un courriel à l’ancien ministre de l’intérieur : « Voilà donc Vichy qui revient : Pétain avait donc oublié ses chiens ! » Il risque 1 000 euros d’amende.

En lisant ces lignes, j’ai tout de suite pensé à un vieux papier que j’avais écrit en 2000 sur une affaire datant de 1941 et dont le titre était : « Pétain est un vieux cul » ou de la nécessité d’abroger l’offense à Chef d’État…

C’est une histoire bien singulière que nous livre la lecture de l’arrêt de la cour d’appel de Grenoble du 30 juillet 1942. Accessible aux Archives départementales de l’Isère, le document rapporte les « incidents » qui eurent lieu entre le 15 et 20 août 1941. Nous sommes non loin de Gap à Tallard. Monsieur L. et son ami entrent dans le café « Le Rivat », s’avancent au comptoir et entament une discussion … de comptoir. On parle de la guerre bien sûr, des Allemands, du rationnement et de l’État français. Durant la conversation qui s’anime, les deux amis en viennent naturellement à évoquer le Maréchal Pétain. Monsieur L. lance à son compère « Pétain est un vieux cul ». Les tenanciers, l’oreille traînante, sont, semble-t-il, outrés. Les propos sont immédiatement rapportés aux autorités judiciaires comme il est d’usage en France en ce temps-là. La condamnation ne se fait pas attendre. Amendes et prison pour « Offense à chef d’état ».

L’offense au chef de l’État constituait dans notre ancien droit le crime de lèse-majesté. La loi sur la presse du 17 mai 1819 punissait ainsi dans son article 9 les offenses publiques envers la personne du roi. Aujourd’hui, c’est l’article 26 (et 36 pour les chefs étrangers) de la loi du 29 juillet 1881 qui traduit dans notre droit positif cet héritage. Cette protection particulière accordée au chef de l’État, au respect dû à ses fonctions et à sa personne est, dit-on, une nécessité pour la bonne conduite de la nation. Du moins, c’est le principe. Car rappelons-le, c’est sur la base de ce texte d’exception que fut condamné Monsieur L. pour avoir dénoncé dans des termes il est vrai peu sophistiqués, un collaborationniste en puissance, le maréchal Pétain.

Qui ne lui donnerait raison aujourd’hui? Et pourtant, la loi et sa jurisprudence n’ont pas changé.
Q’un acte de résistance puisse être condamné par un texte toujours en vigueur, voilà qui est choquant. Ne dites jamais, même dans une conversation privée qui pourrait être entendu que « Chirac est un vieux cul », vous risqueriez une condamnation au titre de l’article 26 de la loi de 1881. Ne dites jamais qu’un dictateur tortionnaire lambda a, ne serait-ce qu’un teint pâlichon, vous vous exposeriez légalement à des poursuites sur la base de l’article 36 de la même loi. Car il faut bien comprendre jusqu’où ce délit peu être entendu. La jurisprudence, constante sur le sujet, s’est définie une doctrine extensive particulièrement dangereuse pour la liberté d’expression. Aujourd’hui le droit positif constate le délit d’offense à chef d’État, dès lors qu’est tenu un propos (voir un simple geste !) pouvant « heurter la délicatesse des sentiments ». Notion qui, soit dit en passant, n’a aucune définition juridique et résulte d’une casuistique autant subjective qu’hasardeuse. Nul doute que certains dirigeants pourraient trouver opportun de s’offusquer que l’on critiqua leur teint. Surtout si la remarque émane d’un opposant politique.

Tout ceci pourrait prêter à sourire si aujourd’hui encore, certains n’étaient poursuivis sur la base de ce texte. C’est ainsi qu’une plainte pour offense à chef d’état étranger a été déposée en septembre 2000 contre l’association Survie, présidée par François-Xavier Verschave et représenté entre autres par Me William Bourdon ; plainte déposée par trois présidents africains, Omar Bongo, Idriss Déby et Denis Sassou Nguesso, avec pour conseil le sulfureux Me Vergès. Il est clair que la loi n’invite pas le rédacteur du papier que vous lisez à se prononcer sur le cas d’espèce. L’offense pouvant être caractérisée à tout moment. Reste qu’à l’heure où les chefs d’État sont de plus en plus perçus en droit international comme de simples justiciables (cf. Milosevic ou Pinochet), et où la France a ratifié le traité instaurant un Tribunal Pénal international, le régime de l’offense semble aller à contre sens de l’histoire. De l’histoire et de l’Europe. Car il n’est rien moins sûr que ce régime d’exception soit compatible avec le corpus juridique tel qu’il ressort de la Convention européenne des droits de l’homme. Quid de la liberté d’expression au sens de l’article 10 de la Convention ou du principe de procès équitable au sens de l’article 6 ? L’intégration européenne y répondra tôt ou tard.

Pouvons-nous accepter aujourd’hui que la liberté d’expression s’aplatisse devant des courtoisies de salon ou devant une vision surannée de la fonction présidentielle ? Que des Jian Ze Min, Vladimir Poutine, et autre prince Rainier puissent tenir en respect les journalistes et associatifs d’une démocratie moderne? À ces questions nos parlementaires doivent répondre* tout en gardant à l’esprit le cri de liberté du résistant anonyme : « Pétain est un vieux cul »!

* Un an après avoir rédigé ce texte (que j’avais soumis à quelques journaux qui ne l’ont pas publié), j’ai écrit une proposition de loi pour le sénateur Dreyfus-Schmidt pour lequel je travaillais à l’époque. Proposition de loi visant à la suppression du régime de l’offense à chef d’état étranger. Les dispositions du texte seront finalement reprises par amendement et introduites dans le code pénal.
Si l’offense pour chef d’état étranger n’existe plus dans notre droit (et je ne suis pas peu fier d’y avoir participé), reste encore ce pustule de l’offense à chef d’état tout court, que Sarkozy n’a pas honte de réactiver.

Journaliste versus blogueur : cas pratique

Je suis navré que ça tombe sur Robert Solé dont j’aime les papiers, mais c’est l’exemple le plus récent de cette dérive que je constate parfois dans les médias tradis.
Robert Solé, donc, du journal Le Monde publie ce 18 octobre un papier titré Justice terrestre où il rapporte l’histoire incroyable d’un sénateur du Nebraska qui a attaqué dieu devant les tribunaux – une action en justice que le juge aurait refusé d’entériner parce que dieu ne serait pas joignable. Drôle non ?
En lisant le billet de Robert Solé, on se dit inévitablement : il est bon ce journaliste, mais comment diable a-t-il pu trouver cette affaire ? À le lire, on a presque l’impression qu’il a rencontré le sénateur américain, qu’il a fouillé son sujet, qu’il habite le Nebraska (?)…
Sauf que.
Sauf que cette histoire, je l’ai moi-même rapporté sur ce blog le 16 octobre, soit deux jours avant notre journaliste. Et surtout, la grande différence, la très grande différence entre le journaliste du Monde et le blogueur que je suis, c’est que moi, je SOURCE !
Car cette histoire insolite, comme je le signale sur mon blog, a été révélée par la BBC (le 16 octobre).
Pourquoi moi, qui ne suis qu’un blogueur non rémunéré, je cite mes sources pour ne pas passer pour un mytho, alors qu’un journaliste du Monde peut se faire mousser sur une histoire qu’il n’a pas déniché et dont il ne cite pas l’origine ?
J’entends de plus en plus de chroniqueurs, tv, radio, papier rapporter des infos insolites qu’ils auraient trouvées via le net, sans jamais citer leur source. Ils profitent du travail de recherche d’autres qu’eux-mêmes. Lorsqu’on parle à la télé par exemple, d’une video incroyable trouvée sur dailymotion ou youtube, pourquoi ne pas dire par quel biais on l’a trouvé ? Car pas la peine de mentir, des videos il y en a des millions, si on l’a trouvé c’est que quelqu’un en a parlé ailleurs et qu’on est tombé dessus.

Tout ça pour dire que les journalistes aujourd’hui se doivent d’être beaucoup plus carrés que les blogueurs s’ils ne veulent pas disparaitre.

Pousser les limites du Flash Mob

Il y a d’abord eu ça : cet excellent Flash Mob exécuté avec brio au début de l’année au Grand Central Station de New York par le collectif ImprovEverywhere.

Et puis, la semaine dernière, il y a eu ce qui suit : le One Man Flash Mob par redux.

Enfin, un cran au dessus (ou en dessous c’est selon), voici mon extraordinaire contribution :

Oui, c’est très concept.
Et est-ce que j’ai rien de mieux à faire là, de suite ? Ben non.

Egoblog repasse en PageRank 6 !

Mais quoi ? Comment ? Nonnnn. Vraiment ? Oui. egoblog repasse en PageRank 6. Si ça ne vous parle pas, c’est plutôt normal. Petit rappel : Le pageranking est une classification que fait Google pour estimer l’intérêt d’un site ou d’un blog. Allant de 0 à 10 (10 étant le maximum) l’indice permet de mesurer non pas son audience, mais son positionnement lorsqu’on effectue une recherche sur Google. À intervalles irréguliers, Google effectue une mise à jour de l’indice (on appelait ça les Google dance) et génère à chaque fois son lot d’heureux et de déçus. La mise à jour semble avoir eu lieu ce week-end. On ne sait pas trop puisque l’entreprise ne communique pas dessus.
À titre d’exemples, le site de Libé a un PageRank de 5, 20minutes.fr de 6, rue89.com, idem.
Ce que je trouve intéressant, c’est que de plus en plus de blogs persos comme le mien, gagnent en crédit au regard de Google et rivalisent avec de grosses structures commerciales.

Et vous, vous en êtes où après cette mise à jour ?